Valérie Schlumberger, la tisseuse de réseaux

Valérie Schlumberger, longue dame aux cheveux blancs, discrète, élégante et dont la réserve peut sembler, pour qui ne la connaît pas, être de la froideur alors que ce ne sont que pudeur et modestie, fut mannequin, styliste, écrivain, auteur de « La tête au Néon » paru en 1980 au Mercure de France, de « style Afrique » paru aux éditions du Chêne en 2008, productrice, costumière et actrice dans "À nos amours" de Maurice Pialat en 1983, actrice dans « Zanzibar » de Christine Pascal en 1989, dans « Belle épine » de Rebecca Zlotowski en 2010, costumière et productrice déléguée dans « 36 fillette de Catherine Breillat » en 1988, productrice dans « Toubab bi » de Moussa Touré en 1991 et « Robert’s Movie » de Canan Gerede en 1992.

C’est en 1969, à l'âge de 16 ans, que Valérie découvre le Sénégal et cela provoque en elle un coup de foudre qui déterminera tout le reste de son existence. Jeune mariée, elle a suivi son époux Christian Saglio, ethnologue, économiste, sociologue, qui fut le précurseur du tourisme équitable en Casamance, le directeur de l'Institut culturel et linguistique Léopold Sédar Senghor de Dakar et l’auteur de nombreux ouvrages, notamment « Sénégal » un livre magistral paru dans la collection «Petite planète» au Seuil, enrichi et réédité en 2004 avec une préface d’Erik Orsenna.

Au programme du jeune couple cette première année, rédiger une thèse sur les Sérères-Ndut (peuple d'Afrique de l'Ouest) pour Christian et, pour Valérie, mettre au monde sa première fille Marine qui naîtra à Dakar et passer son baccalauréat en candidate libre. Très vite, elle apprend le Wolof et découvre la générosité, l’hospitalité (téranga) et la créativité sénégalaises. Au hasard de ses promenades dans Dakar dont les marchés, les boutiques et les faubourgs n’ont bientôt plus de secrets pour elle, ou de ses déplacements dans le pays, elle découvre et apprécie les produits locaux, les artisans, les artistes. C’est son deuxième choc, elle décide alors de « faire voyager » tous ces « trésors de créativité qui jusque là n'allaient pas plus loin que le marché local ».

En ce qui concerne l’aventure CSAO/ASAO, tout a commencé en 1973 où, installée sur l'île de Gorée, et maman de 3 enfants, après Marine, sont nés Noé puis Ondine, Valérie, alors âgée de 21 ans, monte un atelier de teinture et de confection de tissus qu'elle exporte vers la France. Pour la couture, elle fait appel aux Guinéens, pour la teinture, aux Wolofs, principale ethnie du pays, et pour les tissus, aux Libanais, «Ces pièces n'étaient jamais sorties de leurs pays», explique-t-elle. A Paris, le milieu de la mode s'arrache ces textiles en pur coton teints avec de la noix de cola ou de l’indigo. Elle organise aussi pendant trois ans des échanges culturels avec des écoles françaises pendant les vacances d'été créant ainsi des emplois pour les jeunes Goréens.

Après un long interlude en France de 1977 à 1995, pendant lequel elle est tour à tour costumière, décoratrice, romancière, assistante de production et productrice, elle crée en 1995 la CSAO (Compagnie du Sénégal et de l'Afrique de l'Ouest) et aménage sa première galerie au fond d’une cour, dans l’ancien garage de son frère.

Le but de la CSAO, première compagnie à avoir fait du commerce équitable, est de promouvoir le travail des artisans et des artistes et de leur fournir un réseau de distribution en France, en prenant soin de créer des liens d’amitié et de respect mutuel avec chacun, mais aussi de financer l’association ASAO (Association pour le Sénégal et l’Afrique de l’Ouest). L'ASAO, créée en parallèle avec la CSAO dont le but consiste en l’amélioration de la vie quotidienne des femmes et des enfants à Dakar et à Gorée, soutient financièrement des associations comme Keur Khadija, la maison des enfants à Gorée, dont la mission est d’apporter soutien scolaire, éveil pédagogique et diverses activités de loisirs.

En septembre 1998, Valérie ouvre une grande boutique au n° 3 de la rue Elzévir, dans le Marais à Paris, en 2000 elle inaugure un restaurant de spécialités africaines « Le Petit Dakar » au n° 6 de la rue Elzévir.

En 2000, à Dakar, s’associant dans cette entreprise humanitaire avec Anta Mbow, elle prend en bail «L’Empire», un vieux cinéma désaffecté datant des années 1930, le plus ancien de Dakar qui après rénovation devient «L’Empire des enfants», un refuge pour les enfants des rues abandonnés et livrés à eux-mêmes. Pour beaucoup d’entre eux il s’agit de «talibés», confiés par leurs parents à des marabouts corrompus, avides et peu scrupuleux qui les envoient mendier dans les rues de la ville et les maltraitent ou les privent de nourriture s’ils ne rapportent pas assez d’argent. Ces enfants ont bénéficié, à partir de 2003, d’un hébergement, de restauration, d’habillement, de soins médicaux ou de formations et d'ateliers afin de les réinsérer socialement.

De nombreuses collaborations se sont développées entre la CSAO et des marques prestigieuses, séduites par l’originalité et la beauté des produits présentés rue Elzévir. Hermès fut la première à faire appel à la CSAO lors du prix de Diane 1997 puis suivirent John Galliano, Philippe Stark, Christian Lacroix, Christian Louboutin, Côme, Bonpoint, Sézane, Conran Shop, Le Bon Marché, Le Musée Jacques Chirac du quai Branly qui ont utilisé les produits à l’occasion d’expositions ou d’événements.

En 2003, toujours rue Elzévir, surnommée « la rue de la petite Afrique», Valérie, en association avec Youssou N'Dour, ouvre le bar musical-exposition « le Jokko ». Elle rencontre un jeune styliste malien connu aujourd’hui sous le nom de Xuli Bët, met à sa disposition un atelier. L’ensemble boutique, galerie d’art, atelier, restaurant et bar-expo, l’ambiance et les objets uniques que l’on peut y trouver plaît et attire bientôt des célébrités telles John Galliano, Christian Lacroix, Philippe Starck, Eric Serra, John Malkovitch, Romane Bohringer.…

En mars 2006, la CSAO déménage et s'installe un peu plus loin, au n° 9 rue Elzévir qu'elle partage avec la Galerie 3a, spécialisée dans le design africain contemporain.

En 2012, Ondine Saglio, fille de Valérie, vient s’intégrer à l’équipe. Elle avait déjà quelques années auparavant participé de façon ponctuelle à la création de nouveaux produits. Née à Dakar et ayant passé ses sept premières années sur l’île de Gorée, elle aime le Sénégal, le connaît bien et le ressent comme une seconde patrie. Elle a su trouver des débouchés audacieux, prendre des initiatives artistiques, ouvrir d’autres possibilités et donner une impulsion nouvelle à l’entreprise familiale dont elle deviendra rapidement la directrice artistique.

Aujourd’hui, Valérie, tout en conservant un regard attentif et bienveillant et en se tenant informée du fonctionnement de la CSAO, a délégué à Ondine Saglio la direction artistique et à Malika Yakoubi la gestion de l'administration, de l'informatique et du quotidien de la boutique. Se partageant toujours entre Paris et le Sénégal, elle se consacre essentiellement, par le biais de l’ASAO, aux réalisations purement humanitaires et sociales (« L’Empire des Enfants, « Keur Khadidja ») et aux projets à venir (« Keur Diane ») qui germent dans son esprit fertile, désintéressé et généreux.

Les projets déjà réalisés qui fonctionnent :

Aujourd'hui, ils sont 800 à 900 artisans et artistes, tisserands, récupérateurs, peintres, ébénistes, sculpteurs, ferronniers, couturiers, brodeurs à fournir leurs créations. Certains travaillent dans leurs propres ateliers (broderie, confection de bijoux Jokko) à Dakar et Gorée. Ils sont originaires du Sénégal, mais aussi du Mali, du Burkina Faso, de Mauritanie.

L’Empire des Enfants (voir la description plus haut) à Dakar a pour vocation la prise en charge totale et la réinsertion sociale des enfants des rues.

La maison d’hôtes 
La maison d’hôtes, qui se trouve sous la responsabilité souriante d’Amy Sow, bras droit de Valérie au Sénégal dès les débuts, offre un accueil touristique solidaire et social. Les bénéfices générés par l’activité des chambres d’hôtes sont entièrement reversés aux activités sociales de l’ASAO, principalement en faveur du fonctionnement de Keur Khadija.

Keur Khadidja
2015 Ouverture de Keur Khadidja Cette grande maison accueille chaque jour de la semaine tous les enfants de l’île de Gorée qui peuvent y trouver un soutien scolaire, des ateliers et de nombreuses activités d’éveil ainsi qu’une bibliothèque, une ludothèque et une cinémathèque. En effet, l’affluence des touristes représente un danger pour ces enfants bien souvent livrés à eux-mêmes dans les rues de l’île.


Les ateliers de broderie

Ouverts en 2013, situés pour l’un à Gorée, au premier étage de Keur Khadija, installés dans deux grandes pièces lumineuses, les brodeuses y travaillent sous la responsabilité d’Odette Sarr, brodeuse émérite, qui les forme et les encadre, et, pour l’autre, dans la banlieue de Dakar. Tout est régi selon les principes du commerce équitable, dans de bonnes conditions de travail, elles sont rémunérées au nombre de coussins brodés, ce qui leur donne l’occasion de s’émanciper financièrement de leur époux. Face au succès rencontré par la marque, les commandes sont régulières et, de trois brodeuses il y a quatre ans, l’équipe est passée à près de 150. L’atelier de Dakar en accueille certaines qui ont connu de grandes difficultés de vie (violées, SDF, en situation précaire), afin de les réinsérer dans la société.


Transtech
est une entreprise créée en 1993 qui se charge de la collecte et du recyclage des déchets de plastique qui constituent au Sénégal un véritable fléau, en divers objets ou meubles, notamment nous leur devons la création du tabouret YOYO.

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